Corrélats de l’activité physique au cours de la petite enfance
Trina Hinkley, B.A., Jo Salmon, Ph.D.
Centre for Physical Activity and Nutrition Research (C-PAN), Deakin University, Australie
Introduction
L’activité physique joue un rôle important dans bien des aspects de la santé. Chez les jeunes enfants, elle a été associée négativement au statut pondéral1-3 et à la tension4 artérielle. Elle a aussi été associée à des effets bénéfiques sur la santé des os.5 De plus, la pratique d’activités physiques pendant la petite enfance est importante car les habitudes de vie développées à cette période tendent à se maintenir ultérieurement6-7, et peuvent donc être bénéfiques tout au long de la vie. Comme le rapportent les autres textes de ce thème, les niveaux d’activité physique des jeunes enfants varient considérablement selon les études.8-13 Ceci suggère que certains enfants n’ont peut-être pas les occasions ou le soutien dont ils ont besoin pour être actifs. Il est donc impératif de comprendre les corrélats de l’activité physique chez les jeunes enfants ou les facteurs qui pourraient l’influencer, de façon à ce que les enfants qui en ont besoin puissent recevoir le soutien approprié.
Sujet
Les corrélats de l’activité physique chez les jeunes enfants ont été étudiés dans bon nombre de milieux et de contextes. Par exemple, on a constaté que le profil démographique, les caractéristiques biologiques ainsi que l’environnement physique et social étaient tous liés à l’activité physique des jeunes enfants.14 Il faut en apprendre davantage sur ces corrélats pour que les interventions visant à augmenter les niveaux d’activité physique puissent les cibler efficacement.
Problèmes
Jusqu’à tout récemment, on présumait que les jeunes enfants étaient « naturellement actifs physiquement ». Au cours des dix dernières années, il est toutefois devenu évident que bien des jeunes enfants ne pratiquent pas suffisamment d’activités physiques pour maintenir une bonne santé. La recherche sur les corrélats de l’activité physique chez les jeunes enfants a donc commencé à émerger.
Les jeunes enfants fréquentent différents types de milieux, notamment le milieu familial, où ils côtoient leurs parents ou d’autres adultes, le service de garde, où ils sont supervisés par un personnel ayant suivi ou non une formation, les centres préscolaires ou l’école maternelle, où ils peuvent découvrir un large éventail de programmes, et leur quartier, où se trouvent généralement le terrain de jeu et le centre commercial. Les corrélats pouvant influencer les comportements à l’égard de l’activité physique varient aussi selon ces milieux et ces contextes. À la maison, par exemple, le fait d’avoir un compagnon de jeu peut être un facteur déterminant, tandis qu’au centre préscolaire, le fait de disposer d’un plus grand espace extérieur peut contribuer à encourager la pratique d’activités physiques. Il est difficile d’établir les corrélats dans chacun de ces milieux, d’autant plus que les enfants ne peuvent s’auto-évaluer correctement étant donné leur jeune âge et leur stade de développement cognitif. Les parents peuvent effectuer cette évaluation, mais il est possible que l’enfant ne soit pas en leur compagnie pendant de longues périodes de temps (p. ex., pendant qu’il est au centre préscolaire, à la maternelle ou au service de garde), ce qui empêche les parents d’évaluer le comportement de l’enfant ou de noter les corrélats possibles pendant ces périodes.
La diversité des méthodes de mesure qui ont été utilisées pour mesurer l’activité physique des jeunes enfants est un obstacle supplémentaire à l’identification des corrélats de l’activité physique. L’observation directe, les évaluations réalisées par les parents ou des proches, l’accélérométrie et la podométrie font partie des méthodes utilisées. Ces outils mesurent différents aspects de l’activité physique, de sorte que les corrélats que chacun d’eux permet d’identifier diffèrent les uns des autres.
Contexte de la recherche
Les corrélats de l’activité physique sont souvent étudiés dans le cadre d’études transversales. Ce type d’étude ne permet pas aux chercheurs de tirer des conclusions sur le lien de causalité, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas établir avec certitude que le corrélat étudié a un impact sur l’activité physique, mais seulement montrer qu’il y est lié. En outre, bon nombre d’études examinant les corrélats de l’activité physique chez les jeunes enfants utilisent des échantillons relativement petits, comptant généralement moins de 300 enfants, et examinent peu de corrélats potentiels. Comme les enfants d’âge préscolaire peuvent être actifs dans plusieurs types d’environnements, il est aussi important d’identifier les corrélats potentiels dans tous ces environnements. Récemment, quelques études de cohortes ont commencé à apparaître. De telles études permettent de suivre les enfants d’un même groupe pendant une certaine période de temps, ce qui permet aux chercheurs de tirer des conclusions plus solides à l’égard des liens de causalité entre les corrélats et les comportements.
Questions clés pour la recherche
Il s’agit notamment d’établir quels corrélats sont observés dans quels milieux de vie ou contextes, de déterminer les facteurs pouvant être importants au sein de chacun ces contextes ou milieux de vie et de d’évaluer si les corrélats varient selon les caractéristiques de l’enfant, comme son sexe, son origine ethnique et son statut pondéral.
Récents résultats de recherche
Un revue récente des corrélats de l’activité physique chez les jeunes enfants a montré que ceuxci sont plus actifs s’ils sont de sexe masculin, si leurs parents pratiquent des activités physiques et sont actifs en leur compagnie et s’ils passent plus de temps à l’extérieur.14 Aucun lien entre l’âge des jeunes enfants et leur niveau d’activité physique14 n’a été établi. Bien qu’un total de 39 corrélats potentiels avaient été étudiés dans les études recensées, la plupart d’entre eux avaient fait l’objet de trop peu d’études pour que l’on puisse tirer des conclusions solides à leur sujet.
D’autres recherches récentes ont étudié l’environnement des centres préscolaires, des maternelles et des services de garde. Par exemple, des études ont établi que la surface disponible (c.-à-d. le gazon, l’asphalte, etc.), les allées, les structures de jeux ainsi que les espaces ouverts étaient tous corrélés à l’activité physique.15 Les recherches ont aussi montré qu’un plus petit nombre d’enfants par mètre carré d’espace extérieur, de plus courtes récréations,16 la présence des possibilités de faire de l’activité, la disponibilité de structures de jeux fixes et portatives ainsi que la supervision par un personnel formé pour intégrer l’activité physique aux activités des jeunes enfants17 encourageaient la pratique d’activités physiques.
Lacunes de la recherche
L’influence sociale sur l’activité physique des jeunes enfants est peu connue. Par exemple, est-ce que les encouragements et le soutien logistique des parents sont corrélés à des niveaux d’activité physique plus élevés chez les jeunes enfants, comme c’est le cas chez les enfants plus âgés? Mis à part le lien entre le temps passé à l’extérieur et l’activité physique, on en connaît également très peu sur la façon dont les autres comportements des enfants, comme leurs habitudes télévisuelles ou les autres activités devant l’écran, peuvent influencer leurs niveaux d’activité physique. Il est nécessaire d’effectuer des études de cohortes et des études d’intervention pour définir la direction de la causalité des corrélats potentiels.
Comme la recherche dans ce domaine repose principalement sur de petites études transversales pour la plupart menées aux États-Unis et au Royaume-Uni, certains corrélats possiblement importants n’ont peut-être pas encore été évalués. De plus, l’utilisation de mesures objectives de l’activité physique et de protocoles normalisés pour l’analyse et l’interprétation des données aiderait à comparer les résultats des différentes études. Une compréhension approfondie des motivations psychologiques et cognitives innées des enfants, même si celles-ci sont difficiles à identifier chez des enfants d’un si jeune âge, pourrait aussi favoriser la compréhension des comportements des enfants et aider à identifier des stratégies d’intervention individuelles adaptées. Presqu’aucune recherche n’a été menée auprès d’enfants de moins de trois ans.
Conclusions
Bien que l’activité physique soit importante pour la santé et le développement des jeunes enfants, ceux-ci ne respectent pas tous les recommandations en matière d’activité physique. Les études indiquent invariablement que les garçons sont plus actifs que les filles, que les parents qui encouragent leurs enfants à faire des activités physiques et qui y participent ont des enfants plus actifs et que le fait de passer plus de temps à l’extérieur est associé à un niveau plus élevé d’activité physique. Il est nécessaire d’effectuer des recherches supplémentaires afin de suivre l’évolution du niveau d’activité physique des enfants à mesure qu’ils vieillissent et d’examiner les facteurs qui influencent les changements observés. Très peu d’études d’intervention évaluant l’efficacité de stratégies de promotion de l’activité physique chez les jeunes enfants ont été menées, particulièrement auprès des enfants de moins de trois ans.
Implications pour les parents, les services et les politiques
Implications pour les parents
- Les jeunes enfants ont besoin du soutien de leurs parents et d’autres adultes pour avoir accès aux environnements où ils peuvent être actifs physiquement.
- Les jeunes enfants ont besoin de passer du temps à l’extérieur. Idéalement, ils devraient y passer plusieurs heures par jour.
- Les parents devraient donner l’exemple en pratiquant régulièrement des activités physiques saines et en se joignant à leurs enfants dans diverses activités telles que le vélo, la marche ou les jeux favorisant l’activité physique.
- Les parents doivent être conscients que les filles ont besoin de pratiquer autant d’activité physique et doivent dépenser autant d’énergie que les garçons.
Implications pour les services
- Les centres préscolaires, les maternelles et les services de garde devraient être encouragés à amener tous les jours les enfants à l’extérieur, pour des périodes suffisamment longues.
- Si la température peu clémente empêche les enfants de jouer à l’extérieur, les centres devraient idéalement donner la possibilité aux enfants d’être actifs à l’intérieur.
- Le personnel devrait être formé en matière d’activité physique chez les jeunes enfants et il devrait connaître, notamment, les activités appropriées aux enfants dont ils s’occupent et les stratégies leur permettant de maintenir des niveaux sains d’activité physique.
- Les filles pourraient avoir besoin d’opportunités adaptées à leur sexe pour être actives, car la recherche montre qu’elles sont invariablement moins actives que les garçons du même âge.
- L’environnement physique des centres devrait offrir plusieurs possibilités aux enfants de pratiquer des activités physiques, notamment des structures de jeux fixes et portatives ainsi que suffisamment d’ombre.
Implications pour les politiques
- La mise en place de programmes visant à sensibiliser la population à l’égard des moyens que les parents et les autres personnes impliquées peuvent utiliser pour favoriser la pratique d’activités physiques chez les jeunes enfants devrait constituer une priorité nationale dans tous les pays.
- Les politiques gouvernementales régissant les centres préscolaires, les maternelles et les services de garde devraient exiger que les enfants passent un minimum de temps à l’extérieur. Elles devraient aussi prévoir la mise en place de programmes fondés empiriquement qui encouragent l’activité physique et qui se concentrent particulièrement sur les activités adaptées au sexe de l’enfant, de façon à ce que les filles adoptent aussi de saines habitudes en matière d’activité physique.
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Pour citer cet article :
Hinkley T, Salmon J. Corrélats de l’activité physique au cours de la petite enfance. Dans: Tremblay RE, Boivin M, Peters RDeV, eds. Reilly JJ, éd. thème. Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants [en ligne]. https://www.enfant-encyclopedie.com/activite-physique/selon-experts/correlats-de-lactivite-physique-au-cours-de-la-petite-enfance. Publié : Février 2011. Consulté le 8 octobre 2024.
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