[Archivé] Prévenir l’obésité chez les jeunes enfants


University of Ulm, Allemagne

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Introduction

L’obésité et ses comorbidités constituent la principale préoccupation mondiale en matière de santé et il existe peu de traitements efficaces.1-3 La récente augmentation du nombre de personnes qui souffrent de surcharge pondérale dans les pays développés et en voie de développement résulte de changements importants d’habitudes alimentaires et de comportements concernant l’activité physique chez certaines populations. Une grande proportion d’enfants qui grandissent dans ces pays risque de devenir obèse tôt dans leur vie et de développer des comorbidités associées, tel que le syndrome métabolique et le diabète de type 2. Or, ces jeunes enfants chroniquement malades peuvent imposer des pressions importantes sur le système de santé et de services sociaux.

L’augmentation de la prévalence de l’obésité pendant l’enfance, classée comme un problème critique de santé publique au 21e siècle, a conduit les décideurs politiques de plusieurs pays à prendre des mesures préventives. La responsabilité de la prévention de l’obésité chez les jeunes enfants n’incombe pas seulement aux parents et aux familles, mais aussi aux gouvernements nationaux, locaux, aux communautés, aux organismes sans but lucratif, à l’industrie alimentaire, aux médias, aux écoles et aux commissions scolaires.

La connaissance scientifique des mesures efficaces pour prévenir l’obésité chez les jeunes enfants demeure insuffisante. Il est urgent d’en apprendre davantage. Ces mesures devraient viser à influencer les comportements concernant l’alimentation et l’activité physique des jeunes enfants et de leur famille. Plus important encore, il faut établir de nouveaux règlements en matière de protection du consommateur afin de protéger les jeunes enfants contre les influences de notre environnement actuel qui fait la promotion d’aliments à densité énergétique et qui n’encourage pas l’activité physique.

Sujet

L’augmentation de la prévalence de l’obésité est particulièrement frappante depuis la fin des années 1970 dans la plupart des pays industrialisés. Dans certains pays, la prévalence de l’obésité chez les enfants a doublé ou même triplé pendant cette période.1,2 En fait, le poids des enfants obèses a considérablement augmenté.

L’augmentation de poids est surtout prévalente après l’âge de trois ans, (ce qui provoque un rebond adipocytaire – une augmentation physiologique du pourcentage des réserves lipidiques – vers l’âge de cinq ou six ans). Aux États-Unis, la prévalence de l’obésité a doublé (passant de 5 % à 10,4 %) entre 1971-1974 et 1999-2000 chez les enfants âgés de deux à cinq ans4 de sorte que les premières années de la vie pourraient bien être la meilleure période pour intervenir en matière de prévention primaire ou ciblée de l’obésité.

L’obésité est une condition acquise; personne ne nait obèse. Quand les réserves lipidiques de l’organisme augmentent, le corps trouve un nouvel équilibre énergétique stabilisé.3 Jusqu’à présent, les données publiées n’appuient pas l’hypothèse selon laquelle ce développement serait réversible. Ce qui rend les influences développementales de l’enfant particulièrement intéressantes pour la recherche de mesures préventives efficaces. Par conséquent, la prévention devrait commencer le plus tôt possible.

Problèmes

L’obésité pendant l’enfance est associée à une grande variété de troubles qui affectent de multiples systèmes organiques. Une augmentation de poids chez l'enfant peut par exemple provoquer une résistance à l’insuline, une intolérance au glucose, de l’hypertension et des problèmes orthopédiques.1 Certaines de ces conditions entraînent des symptômes cliniques chez le patient, alors que d’autres ne le font pas. Les changements physiologiques et métaboliques associés à l’obésité chez les enfants ont tendance à les suivre jusqu’à l’âge adulte et augmentent les risques de maladies, de handicaps et de décès.

Une des conséquences les plus importantes de l’obésité pendant l’enfance est la manifestation précoce du diabète de type 2 et le syndrome métabolique. Chez les jeunes, le diabète de type 2 s’est accru en même temps que l’augmentation du poids corporel. Selon les données de NHANES III, la prévalence du syndrome métabolique est de 0,1 % et de 16 % chez les adolescents obèses.5 Ces effets négatifs de l’obésité entraînent un risque élevé de dommage secondaire à un organe, y compris de maladie cardiovasculaire, du foie et des reins. Les comorbidités de l’obésité pendant l’enfance sont si élevées qu’elles entraineront sans aucun doute des coûts de santé pour le pays.6

De plus, l’obésité chez les jeunes enfants est associée à un statut socio-économique moins élevé7 et à une plus grande proportion de problèmes psychiatriques.8

En effet, le traitement de l’obésité et des comorbidités qui lui sont associées est devenu un défi colossal. Les programmes de traitement basés sur la modification des activités physiques et des comportements alimentaires ne se sont révélés efficaces que pour une minorité de patients et leur famille. Mais aujourd’hui, il n’y a tout simplement pas de traitement efficace pour la majorité des enfants.1

Contexte de la recherche

Récemment, l’augmentation des taux d’obésité s’est produite sur une trop courte période pour indiquer des changements génétiques significatifs chez les populations. Ainsi, la cause principale de l’augmentation rapide de l’obésité tient peut-être aux changements environnementaux et sociétaux qui affectent désormais de grandes populations d’enfants dans le monde.

Le développement de l’obésité résulte d’un déséquilibre entre l’apport et la dépense d’énergie. Ce déséquilibre énergétique chez les enfants provient principalement de l’inactivité physique (l’écoute fréquente de la télévision), de la consommation d’aliments très gras et à haute teneur énergétique (des collations, des boissons avec sucre ajouté, des produits de la restauration rapide) et de la consommation de grandes portions alimentaires.2,3,9-11 Les jeunes enfants ne sont pas capables de décider de contrôler ou de modifier eux-mêmes leur équilibre énergétique en contrôlant la qualité (le contenu énergétique) et la quantité (quantité des portions lors du repas) des aliments et en augmentant leur activité physique. Même les adultes réussissent rarement à contrôler leur équilibre énergétique pendant de longues périodes.

Les chercheurs ont démontré que l’environnement et les facteurs sociétaux affectaient la consommation de nourriture et les modèles d’activité physique et qu’ils accablaient les processus physiologiques régulatoires (en dehors de notre contrôle individuel) qui sont à l’œuvre pour maintenir un poids stable. La période postnatale et la prime enfance sont des moments sensibles pour le développement de la perception du goût, les comportements alimentaires et probablement aussi les comportements concernant l’activité physique. Le comportement alimentaire est influencé par les stratégies alimentaires des parents et les interactions entre parent et enfant, et les influence également. Le niveau d’activité physique des parents influence aussi les comportements des jeunes enfants en cette matière.

Plus de recherches sont nécessaires pour comprendre les effets développementaux reliés à la régulation de la consommation alimentaire et de l’équilibre énergétique. Il faut aussi s’efforcer d’identifier les facteurs environnementaux et sociaux pertinents qui affectent les modèles alimentaires et ceux reliés à l’activité physique chez les familles.

Questions clés pour la recherche

Plusieurs questions clés pour la recherche devraient être abordées afin de rassembler des connaissances sur les facteurs responsables de l’augmentation de l’obésité chez les jeunes enfants. Ces connaissances nous permettraient de mieux formuler des mesures efficaces pour prévenir l’obésité pendant l’enfance. Plus spécifiquement, la recherche doit se centrer sur les facteurs développementaux impliqués dans l’acquisition de modèles alimentaires et d’activité physique négatifs et sur les possibilités de modifier ces facteurs environnementaux négatifs. Nous devons nous demander :

  1. Quels processus développementaux impliqués dans la régulation de la consommation et de la dépense énergétique sont influencés par l’environnement de vie des jeunes enfants ?
  2. Est-il possible de modifier ces facteurs environnementaux et de prévenir le développement de modèles alimentaires et d’activité physique négatifs ?
  3. Est-il possible d’apprendre aux enfants à résister à ces facteurs sans modifier l’environnement ?
  • Par exemple, on s’inquiète du fait que l’introduction précoce de boissons sucrées et de collations à haute teneur en gras et à saveur sucrée puisse être des facteurs de contribution importants à l’obésité pendant l’enfance puisqu’ils peuvent entraîner une préférence précoce pour ces aliments et ces boissons.12,13 Nous devons donc nous demander jusqu’à quel point l’introduction précoce d’aliments au goût artificiel, à haute teneur en gras et en énergie influence le développement de la perception du goût et les comportements alimentaires.

Davantage de données sont nécessaires pour appuyer la théorie selon laquelle les modèles alimentaires précoces seraient des facteurs de contribution importants à l’obésité pendant l’enfance, et les prochaines études sur l’intervention doivent prouver cette théorie. Ces études devraient soit enseigner aux familles à éviter ces produits, soit exiger une réglementation des ventes et de la publicité de ces produits.

Récents résultats de recherche

Les récents résultats de recherche ont été recensés en profondeur ailleurs1,2,4,12 et sont résumés dans les paragraphes suivants.

Facteurs génétiques et biologiques

Certaines données appuient le rôle des facteurs génétiques.2 L’augmentation de la prévalence de l’obésité affecte disproportionnellement certains groupes ethniques d’enfants à haut risque comparés à la population générale.4 Après l’âge de trois ans, l’obésité parentale est un prédicteur plus fort de l’obésité de l’enfant à l’âge adulte que le poids de ce dernier.14 Cependant, les caractéristiques génétiques des humains n’ont pas changé au cours des trois dernières années. Ainsi, les gains de poids récents dans la population résultent d’une interaction de génotypes et de facteurs environnementaux et comportementaux. Les facteurs génétiques augmentent la prédisposition à prendre du poids dans un environnement de vie moderne.

D’autres études ont montré que les facteurs biologiques influençaient le gain de poids et ont élargi l’hypothèse de « l’amorce métabolique » 15 : plusieurs études décrivent une relation en forme de U entre le poids à la naissance et l’IMC plus tard (avec une prévalence plus élevée d’obésité pendant l’enfance observée chez les nourrissons dont le poids à la naissance est le plus faible et le plus élevé).16,17 Le diabète maternel pendant la grossesse se traduit par une progéniture dont le poids de naissance est plus élevé et dont le risque d’obésité pendant l’enfance est plus élevé à l’âge de cinq ans.18

Les études montrent aussi que le gain de poids postnatal est important. Un faible poids de naissance suivi d’un rattrapage rapide de la croissance pendant la petite enfance semble être un facteur de risque de développement de perturbations métaboliques (résistance à l’insuline, hyperinsulinisme) et d’obésité. Il a aussi été démontré qu’un rebond adipocytaire précoce représentait un plus grand risque d’obésité subséquente.19

Développement du goût et de la faim, perception de la satiété et comportement alimentaire

On sait depuis un certain temps que les hormones affectent considérablement le développement du cerveau. De nouvelles données suggèrent aussi que la nutrition périnatale et in utero peut avoir des effets à long terme qui se poursuivent à l’âge adulte. Les résultats obtenus grâce à des études sur les animaux suggèrent qu’il y a des périodes critiques pour le développement du cerveau tôt dans la vie qui peuvent affecter profondément la consommation d’aliments et le poids.

Récemment, on a montré que la leptine pouvait moduler le nombre de synapses et l’activité synaptique dans les neuronesà NPY et à POMC dans le noyau arqué hypothalamique.20,21 Ces résultats suggèrent que les fonctions de la leptine sont essentielles pour le développement du cerveau, en favorisant la formation de trajectoires hypothalamiques qui transmettent plus tard des signaux leptines aux régions du cerveau, régulant ainsi la consommation alimentaire et énergétique. Ces observations sont cohérentes avec le concept selon lequel la sous ou la surnutrition pendant les périodes critiques du développement hypothalamique peuvent entraîner des effets durables et potentiellement irréversibles à l’âge adulte.

Les études sur les humains (les études précédemment mentionnées ont été effectuées sur des souris) suggèrent que les premières années de la vie constituent une période sensible pour le développement des comportements concernant l’alimentation et l’activité physique. Les jeunes enfants ont un sens physiologique de la satiété qui les conduit à manger uniquement jusqu'à ce qu’ils soient satisfaits. Les chercheurs ont suggéré que la taille des portions alimentaires consommées par les enfants d’un à deux ans était consistante depuis les 20 dernières années. On a montré que tôt dans la vie, les nourrissons étaient sensibles à la densité énergétique des aliments et étaient capables de contrôler le volume.22 Cependant, ils deviennent de plus en plus sensibles aux signaux environnementaux comme la taille des portions. Vers l’âge de cinq ans, de plus grandes portions peuvent entraîner une augmentation générale de la consommation alimentaire.

On sait aussi que l’expérience des saveurs dans le lait maternel provenant de divers aliments favorise l’acceptation de ces derniers quand ils sont introduits sous forme solide plus tard. Les enfants préfèrent le sucré et  le salé.23 Par conséquent, le fait de s’habituer à des aliments qui ne goûtent ni sucré ni salé est un processus d’apprentissage qui demande des expériences positives répétées.24,25

Facteurs psychosociaux

Les facteurs de risque pour le développement de l’obésité chez les jeunes enfants comprennent des facteurs psychosociaux et familiaux. Chez les enfants et les adultes, l’index de masse corporelle (IMC) varie de façon importante selon le statut socio-économique de la famille.26 Les facteurs psychosociaux qui peuvent augmenter le risque d’obésité chez l'enfant comprennent le faible statut socio-économique, le fait d’être un enfant unique et de vivre avec un seul parent. Les contextes culturels et psychosociaux peuvent aussi influencer les attitudes alimentaires parentales et les interactions parent-enfant.27,28

Allaitement

Les données épidémiologiques suggèrent que l’allaitement procure un petit, mais néanmoins important, degré de protection contre l’obésité pendant l’enfance. Une récente recension de 11 études comportant un échantillon de taille adéquate (tous contrôlés pour éliminer les facteurs de confusion) a découvert que huit des études montraient que les enfants allaités couraient moins de risques de surcharge pondérale.29 On pense que l’allaitement favorise l’habileté de l'enfant à réguler la consommation d’énergie en lui permettant de s’alimenter en fonction des signaux de faim et de satiété, ce qui permet un meilleur contrôle des portions alimentaires plus tard.30 Grummer-Strawn et coll.31 ont analysé des données longitudinales des Centers for Disease Control and Prevention Pediatric Nutrition and Surveillance System et ils concluent que l’allaitement prolongé est associé à une réduction du risque de surcharge pondérale.

Produits alimentaires

Halford et coll.32 ont montré que l’exposition des enfants d’âge scolaire à des publicités sur les collations favorisait la surconsommation de ces dernières et affectait les comportements alimentaires de façon différente, surtout chez les enfants obèses. Cette découverte suggère que la diminution de la publicité de ces produits aidera à prévenir les comportements alimentaires préjudiciables. De plus, Ebbeling et coll.1 ont récemment montré que les adolescents obèses sont plus susceptibles que les autres d’abuser des aliments gras et sont moins capables de neutraliser cette consommation excessive d’énergie quand ils n’y sont pas contraints.33 Dans une étude de suivi d’une durée de 15 ans, Pereira et coll. ont montré que les habitudes des enfants en matière de restauration rapide sont fortement, positivement et indépendamment associées au gain de poids et à la résistance à l’insuline chez les jeunes adultes noirs et blancs aux États-Unis. 

Les boissons gazeuses sont la principale source d’hydrates de carbone chez les enfants américains dès l’âge de deux ans.34 La consommation de lait baisse au fur et à mesure que la consommation des boissons sucrées augmente. Une étude prospective a rapporté une association positive entre la consommation de boissons sucrées et l’obésité.35 La consommation de sources d’hydrates de carbone facilement disponibles (les aliments qui contiennent un index glycémique élevé) peut causer des fluctuations importantes du niveau de glucose sanguin et de l’insuline, surtout chez les jeunes enfants, ce qui entraîne des effets désavantageux pour le métabolisme. Ces diètes peuvent programmer des fonctions de cellules beta,  entraînant une augmentation de la sécrétion de l’insuline qui pourrait en soit alimenter davantage le gain de poids.36-38 Les chercheurs ont aussi suggéré que les édulcorants caloriques ajoutés aux boissons et qui contiennent surtout du fructose provoquent peu la satiété, entraînent la surconsommation de calories, un gain de poids subséquent et finalement, le diabète de type 2.

De nouvelles données appuient l’hypothèse selon laquelle la consommation de fructose a des conséquences hormonales et métaboliques qui peuvent faciliter le développement de la résistance à l’insuline ainsi que l’obésité.39 Dans certains pays, les boissons gazeuses sont sucrées avec du sirop de maïs à haute teneur en fructose qui contient jusqu’à 55 % du fructose monosaccharide. Ce sirop se retrouve aussi dans les aliments transformés comme les friandises, les craquelins et les sauces au ketchup. Encore une fois, cet ingrédient ne semble pas parvenir à satisfaire la faim, mais réussit généralement à augmenter le potentiel de surconsommation.

Activité physique

Wels et al.40 ont montré que les niveaux d’activité du nourrisson sont associés à une plus grande épaisseur du pli cutané pendant l’enfance. Une autre étude suggère que le faible niveau d’activité physique des enfants d’âge préscolaire est associé à des niveaux plus élevés de réserves lipidiques.41 L’environnement familial joue un rôle important dans la détermination du niveau d’activité physique, tout particulièrement chez les jeunes enfants.2

Il y a une association positive entre l’augmentation de la prévalence de l’obésité et le temps passé à écouter la télévision.42 L’écoute de la télévision peut avoir un effet négatif sur l’équilibre énergétique en remplaçant les moments de jeu actif et d’activité physique et en augmentant la consommation de calories (devant la télévision), un facteur qui peut aussi provenir de l’influence de la publicité sur les aliments.42

Modèles d’identification des parents et des donneurs de soins

Les parents jouent un rôle important dans la détermination du développement du poids de leurs enfants. Une connaissance insuffisante de l’alimentation saine, des comportements alimentaires sains et de l’augmentation de l’inactivité physique (les parents comme modèle) sont les principaux facteurs qui influencent les comportements des enfants face à l’alimentation et à l’activité physique.

La recherche suggère que la restriction des aliments au goût agréable peut entraîner une augmentation de la préférence envers ces aliments. De plus, les styles alimentaires des parents peuvent favoriser la surconsommation alimentaire des enfants. Le fait de mettre de la pression sur eux pour qu’ils mangent tout ce qui se trouve dans leur assiette (« Fini ton assiette! ») peut encourager la surconsommation.

Dans une revue complète de la littérature, la plupart des études publiées ont rapporté au moins une association significative entre les styles alimentaires des parents et les résultats des enfants. Les restrictions alimentaires parentales ont été associées à une augmentation de la consommation alimentaire et du poids des enfants.27,28 Le gain de poids des enfants semble conduire les parents à imposer des habitudes alimentaires restrictives, ce qui peut entraîner un gain de poids supplémentaire.27,28 Par conséquent, les lignes directrices en matière de prévention de surcharge pondérale, qui prennent en compte les caractéristiques de l’enfant comme sa prédisposition à l’obésité et son poids actuel, peuvent être bénéfiques.

Il ne faut pas oublier qu’il est normal qu’un enfant rejette un nouvel aliment inconnu. Cinq à dix expositions à certains nouveaux aliments peuvent être nécessaires pour qu’ils soient acceptés. L’exposition répétée est plus critique pendant les premières années de la vie. Les études ont montré que l’exposition introduite par les parents pouvait conduire les enfants à accepter davantage les légumes13,43 et que les services préscolaires étaient des endroits efficaces pour promouvoir l’acceptation de nouveaux aliments auprès des enfants.44

Les parents et les donneurs de soins sont des modèles d’identification importants et leurs choix alimentaires influencent ceux des enfants. En grandissant, ces derniers font leurs propres choix à l’école et leurs goûts ont tendance à influencer les décisions familiales en matière de choix alimentaires.

Une récente intervention familiale s’est concentrée sur la réduction des comportements sédentaires (surtout sur l’écoute de la télévision), avec pour objectif d’influencer les comportements face à l’alimentation et à l’activité physique et de perdre du poids. Les premiers résultats de ces études sont prometteurs.45

Conclusion

La surcharge pondérale et l’obésité des enfants sont des problèmes de santé mondiaux en constante augmentation. Étant donné que le traitement et la réduction à long terme de l’excès de poids sont des défis qui se révèlent souvent insurmontables, la prévention semble être la solution optimale. Plusieurs recherches appuient l’utilisation de mesures préventives pendant la petite enfance. Il est certain que les parents et les éducateurs devraient chercher à connaître les mesures raisonnables et devraient être eux-mêmes des modèles d’identification en matière d’alimentation saine et d’activité physique.

Cependant, la prévention de l’obésité échouera probablement si l'on se concentre uniquement sur le parent ou sur l’enfant sans s’intéresser à l’environnement de ce dernier. La prévention de l’obésité (c’est-à-dire la résistance envers le gain de poids) nécessite un programme de santé publique très étendu. Par conséquent, les gouvernements locaux et nationaux, les communautés, les organismes à but non lucratif, l’industrie alimentaire, les médias, les écoles et les commissions scolaires devraient travailler à améliorer l’environnement de vie des enfants afin qu’ils adoptent tôt dans la vie de saines  habitudes d’alimentation et d'exercice.

Implications

  • En accord avec l’Académie américaine de pédiatrie, l’allaitement exclusif est recommandé pendant les quatre à six premiers mois de la vie.46
  • On recommande de réduire le temps passé à regarder la télévision et les autres comportements sédentaires afin de prévenir l’obésité.42,47 L’Académie américaine de pédiatrie48 recommande de ne pas mettre de télévision dans la chambre des enfants. Le temps passé à écouter la télévision devrait être limité à une ou deux heures par jour et il doit s’agir de programmes de qualité. Les enfants de moins de deux ans ne devraient pas regarder la télévision.
  • Les parents et les donneurs de soins devraient être des modèles d’identification positifs afin d’influencer les comportements des enfants en ce qui concerne l’alimentation et l’activité physique. Le rejet initial d’aliments nouveaux est normal. Cinq à dix expositions à des aliments nouveaux peuvent être nécessaires pour qu’ils soient acceptés et la répétition de l’expérience est plus critique pendant les premières années de la vie. Les parents et les donneurs de soins devraient limiter les collations et les boissons malsaines et éviter d’utiliser la nourriture comme récompense.
  • Les personnes qui travaillent en santé publique et dans l’industrie alimentaire devraient connaître les types d’aliments publicisés auprès de tous les jeunes. La production de nouveaux types d’hydrates de carbone sucrés qui se digèrent lentement, qui sont riches en fibres et faibles en insuline peuvent aider, ainsi que le développement de boissons et d’aliments qui sont plus rassasiants.
  • La qualité nutritionnelle des aliments et des boissons servis et vendus à l’école doit être améliorée. Des interventions scolaires visant à réduire le temps que les enfants passent à regarder la télévision devraient être implantées; ces programmes se sont révélés efficaces à court terme.47,49 Les besoins culturels et le sexe des personnes devraient être pris en compte.
  • Les parents devraient considérer le poids de leurs enfants  comme un indicateur essentiel de la santé. Ils devraient s’assurer qu’un professionnel formé mesure fréquemment la taille et le poids de l'enfant (au moins une fois par an).

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Pour citer cet article :

Wabitsch M. [Archivé] Prévenir l’obésité chez les jeunes enfants. Dans: Tremblay RE, Boivin M, Peters RDeV, eds. Fisher JO, éd. thème. Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants [en ligne]. https://www.enfant-encyclopedie.com/obesite-infantile/selon-experts/prevenir-lobesite-chez-les-jeunes-enfants. Publié : Mai 2006. Consulté le 29 mars 2024.

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